Logo Globice Réunion
|9 juillet 2020

SAISON BALEINES 2020 : VERS UN “MAUVAIS MILLÉSIME” ?

Les baleines se font très discrètes à La Réunion depuis les premières observations début mai. Les individus signalés sont peu nombreux et généralement furtifs. Au point que beaucoup craignent une mauvaise saison 2020. C'est malheureusement ce que les modèles scientifiques de Globice, encore expérimentaux, semblent confirmer.

Globice mène en effet depuis 2004 des prospections en mer pour évaluer les variations de fréquentation des baleines à bosse autour de La Réunion. D’une année sur l’autre, les saisons ne se ressemblent effectivement pas ; certaines sont marquées par une très faible fréquentation de baleines à bosse (2015/2016), et d’autres inversement exceptionnelles (2017/2018).

Les causes de cette forte variabilité sont encore méconnues. L’un des objectifs de Globice est de mieux comprendre les facteurs pouvant influencer ces variations interannuelles, et notamment les conditions environnementales sur les zones de nourrissages en Antarctique. Pour cela, différentes variables environnementales (température de l’eau, chlorophylle, salinité, indice El Nino, etc.) ont été analysées, sur la base d’images satellitaires, et corrélées à la fréquence d’observation des baleines à bosse à La Réunion.

Les résultats préliminaires des modélisations montrent une influence potentielle de la concentration en chlorophylle A en Antarctique, sur un intervalle de 30 mois (soit trois étés australs avant la saison de présence des baleines à bosse considérée). A la base de la chaine alimentaire, la chlorophylle A constitue la principale ressource alimentaire et énergétique du krill, nourriture principale des baleines à bosse. Un délai de 30 mois pourrait refléter le cycle de vie du krill.

Ainsi, de faibles concentrations en chlorophylle A pendant les étés australs de 2012/2013 et 2013/2014 dans différentes zones Antarctique pourraient expliquer, du moins en partie, le faible niveau de fréquentation des baleines à bosse observé à la Réunion, et plus généralement sur les sites de reproduction du sud-ouest de l’océan Indien, en 2015 et 2016.

Qu’en est-il en 2020 ? Bien que le modèle ne soit pas véritablement prédictif en raison de la disponibilité tardive des données, Globice a tenté l’exercice de faire “tourner" son algorithme pour déterminer une hypothèse de fréquentation pour l’année en cours. Comme l’atteste le graphique ci-dessus, le résultat s’approche des valeurs des plus faibles niveaux de fréquentation de ces dernières années.

Faut-il pour autant en conclure que la saison 2020 sera à coup sûr mauvaise ? Ce n’est qu’une hypothèse que peuvent faire mentir des variables encore mal appréhendées. Le modèle étant expérimental, sa robustesse doit s’éprouver au fil du temps. Seul le bilan réel de fin de saison nous indiquera s’il peut être considéré comme crédible. A défaut de baleines, ce serait une certaine consolation pour la connaissance scientifique.